Hentai Land
Cela faisait longtemps que l’on n’avait pas entendu parler de Shoujin Fukui, réalisateur de Pinocchio 964 ou encore de Rubber’s Lover (en fait son dernier film en date). Pour son retour derrière la caméra, il a choisi la voie de la discrétion puisque c’est pour un film documentaire qu’il a repris du service. Un documentaire où il s’efface presque totalement au profit des artistes présentés.
Le principe de Hentai Land et de laisser quatre dessinateurs de manga s’exprimer librement et artistiquement sur le corps d’une « art idole », à savoir Koe-chan. Nue, cette dernière va servir de toile ou de papier pour quatre œuvres très temporaires. Fukui filme chaque artiste au travail, du début de l’œuvre à son achèvement, phase finale où se mélangent les commentaires des artistes et les images de « l’œuvre ».
Les quatre artistes sont respectivement Shirou Kasama, Henmaru Machino, Takashi Nemoto, et enfin Makoto Aida.
Des quatre artistes, Shirou Kasama et Makoto Aida sont certainement ceux qui s’en sortent le mieux. Shirou Kasama offre une œuvre chargée, entre le tableau et le tatouage. Le corps est abondamment couvert de peinture dont l’aspect craquelé lors du séchage donne encore plus de valeur au dessin (notamment celui du dos, un dessin traditionnel proche du tatouage). L’abdomen de Koe-chan sert quant à lui à l’expression de plus d’humour, notamment par la façon dont il utilise les seins.
Makoto Aida utilise lui aussi les seins comme éléments de son œuvre, un visage éploré d’une jeune fille dans un style très manga avec bulles à l’appui (les seins forment les yeux). L’impression finale est assez forte et c’est à mon goût le mariage le plus réussi entre le corps de Koe-chan et le dessin. Une véritable osmose qui résulte en le sentiment de voir un véritable visage géant et vivant, faisant oublier la présence même de Koe-chan.
Henmaru Machino s’amuse plus volontiers et donne tout son poids au mot « pervers » (hentai) avec le dessin, dans le dos, d’une écolière chevauchant une pieuvre-sexe éjaculant et dont les tentacules parcourent le corps de Koe-chan. De facture très classique, sur le fond comme la forme, l’utilisation d’un modèle vivant ne m’apparaît de plus pas foncièrement très original. L’impression de perversité met cependant un peu mal à l’aise, au point que même Henmaru Machino semble gêné une fois qu’il regarde le résultat. Il est certain que c’est autre chose de dessiner des perversités sur du papier que sur le corps nu d’une fille.
Quand à Takashi Nemoto, je concède ne pas du tout avoir accroché à son œuvre. Son style particulier s’accommode mal de la peinture sur corps, et le résultat est assez proche d’aplats multicolores de peinture sans grande cohérence. De plus, il n’a quasiment pas fait utilisation des singularités de l’exercice (à savoir peindre sur un corps).
La patte de Fukui est difficile à discerner si ce n’est dans les courts passages entre chaque œuvre où il filme Koe-chan sur le chemin d’un lieu à un autre pour aller se faire peindre. Chaque accomplissement d’œuvre étant résumé en une vingtaine de minutes, l’ennui n’a pas le temps de nous gagner même s’il n’est pas toujours très passionnant de voir les artistes à l’œuvre (à part pour se rincer l’œil). Ces derniers n’étant de plus guère loquaces pendant leur travail, la vision du résultat final et des quelques commentaires des artistes peut amplement suffire. C’est en tout cas bien plus intéressant que de regarder une idoru en bikini pendant une heure.
Ci-dessous, de gauche à droite, comparaison des styles des quatre artistes : Kasama, Nemoto, Machino et Aida.
Disponible en DVD au Japon.



