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Hong Kong

New Blood

Hong Kong | 2002 | Un film de Cheang Pou-Soi (Soi Cheang) | Avec Bernard Chow (Ying Kit), Chow Chi-Kui, Niki Chow Lai-Kei, Winnie Leung (Man Yee)

Les lecteurs fidèles de SdA le savent parfaitement : nous avons longtemps désespéré de voir des films d’horreur hongkongais de qualité. Heureusement pour nous, ce genre quelque peu délaissé par les asiatiques - en dehors du Japon bien sûr - connaît un certain regain d’intérêt dans l’ex-colonie, et voit même quelques longs-métrages tout à fait honorables naître de l’interminable vague post-Sixième Sens. Parmi les réussites récentes du genre, deux titres en particulier me viennent à l’esprit : Inner Senses et The Eye. Kuro rajouterait très certainement à cette courte liste le non moins récent de Horror Hotline... Big Head Monster (que je n’ai malheureusement pas encore vu) ; autant dire que ça nous arrangerait bien, puisque c’est le réalisateur de ce dernier, Cheang Pou-Soi, qui nous livre aujourd’hui cet intriguant New Blood...

Deux policiers sont dépéchés au pied d’un immeuble pour tenter d’empêcher un homme de se suicider. L’un d’eux monte pour tenter de raisonner le désespéré, tandis que l’autre, Lok, reste en bas de l’immeuble, interpelé par une traînée de sang qui s’écoule dans le caniveau. Lok suit les traces et arrive auprès d’une voiture ; c’est à cet instant que l’homme se jette du haut de l’immeuble pour atterrir sur le véhicule en stationnement. Le choc fait surgir les cadavres d’un homme et d’une femme qui viennent de commettre un double suicide en s’entaillant les poignets...
Lok emmène le couple à l’hôpital ; en état critique, les amoureux sont en train de se vider tandis que le staff recherche des donneurs de résus AB négatif. Ca tombe bien, Lok fait partie des rares donneurs de ce groupe sanguin ; se joignent à lui Eric, un jeune architecte, et Joy, femme timide qui semble faire une fixation sur le policier. Malheureusement, la transfusion ne suffit pas à ramener la jeune femme à la vie : celle-ci souffrait visiblement d’un cancer et était déjà trop affaiblie. Son compagnon quant à lui, reste dans le coma. Lorsque les infirmières sortent le cadavre de la défunte, celle-ci semble bouger à l’intérieur du cerceuil métallique - et pourtant la femme est bel et bien décédée. Comment est-il possible alors que Joy l’ait vu diriger son regard vers elle ? A partir de cet instant, les trois donneurs vont être persécutés par des hallucinations morbides, mettant en scène le fantôme terrifiant de la femme qu’ils ne sont pas parvenus à sauver...

Qu’il est appréciable de voir un film d’horreur d’un tel niveau - qui plus est parfaitement original - sortir des rangs de la production hong-kongaise ! New Blood est en effet une véritable réussite dans le domaine de l’horreur pur.
Dés les première images du film - des détails du double suicide qui rythment le générique - New Blood apparaît comme un film sombre et travaillé : que ce soit la photographie, les cadrages ou la musique, nous sommes ici bien loin d’un Wicked Ghost ou autres Sleeping with the Dead au rabais, en présence d’un authentique film malsain - presque malade. Pendant sa première demi-heure en effet, New Blood est si pesant, si insistant dans le malaise que ç’en est presque dérangeant. Cheang Pou-Soi déballe une réalisation très particulière, à la fois statique et mouvante, insidieuse, et fait naître la peur de cadrages tronqués, de symétries illogiques et dysfonctionnelles entre le chaud (l’humain) et le froid (l’hôpital), entre l’ombre et la lumière. La séquence de la transfusion - au cours de laquelle le réalisateur ne lésine aucunement sur les visuels sanglants - et les quelques plans qui la précède sont à ce titre parfaitement réussis, rythmés qui plus est par une musique qui doit énormément (voire même des royalties) à la terrassante bande-son de Clint Mansell pour Requiem for a Dream.

Puis le malaise s’atténue, mais l’horreur s’intensifie en devenant plus primitive, plus pure : la peur du noir, d’une main qui jaillit de sous un lit, d’une apparition improbable à la fenêtre... Cheang Pou-Soi tape très vite et très fort afin de se donner le temps de développer ses personnages dans la suite de l’histoire. Le spectateur, déjà un peu groggy, se prend le coup de grâce avec l’épouvantable flash-back qui justifie la "maladie" du personnage de Joy (qui porte décidemment bien mal son joli prénom) ; à partir de cet instant, les visions se font plus rares, mais le spectateur conditionné redoute encore plus leurs apparitions.

Dans sa seconde partie, New Blood joue plus sur le doute instauré par la maladie, que sur l’effroi affirmé de la première - il devient d’ailleurs en ce sens assez proche de l’excellent Inner Senses. Cheang Pou-Soi délaisse une réalisation iconoclaste pour une approche plus posée, s’appuyant presque totalement sur la prestation surprenante de Niki Chow (Horror Hotline..., Dummy Mommy, Without a Baby). La jeune actrice est absolument terrifiante ; son amalgame avec la revenante revêt un caractère doublement fantastique (folie ou possession ?) qui lui permet d’affirmer un talent dramatique absolument insoupçonné.

Très riche dans ses multiples conceptions de l’horreur - à la fois au niveau cinématographique et humain - New Blood est un film d’horreur étonnant. Même l’ultime rebondissement - très Sixième Sens dans l’esprit - qui peut paraître à première vue injustifié, renforce l’ambiguïté de l’histoire vécue jusqu’à ce dernier instant : folie méthodique ou possession maléfique ? Quelle que soit la nature véritable du mal dans New Blood, on ne peut que saluer le travail de Cheang Pou-Soi, qui livre ici à mon avis le meilleur film d’horreur HK de l’année 2002. Et dire que 2003 ne fait que commencer !

New Blood est disponible en VCD et DVD HK chez Mei-Ah.
A l’exception de quelques plans trop sombres très peu appréciés du support, le VCD est d’une qualité tout à fait exemplaire.

- Article paru le dimanche 26 janvier 2003

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