Abashiri Bangaichi
Ishii : 1 / Tôei : 0... puis beaucoup plus !
Dans la froid glacial d’Hokkaidô, à 350 km de Sapporo la prison d’Abashiri abrite les prisonniers les plus indociles du Japon. Tachibana, jeune détenu insoumis, a trois ans à purger. Si ses premiers mois sont difficiles, il finit par se faire bien voir par la hiérarchie carcérale. Alors qu’il ne lui reste qu’un mois à purger, sur le point de recevoir une remise de peine pour bonne conduite, Tachibana est contraint à l’évasion par Gonda, l’un de ses co-détenus auquel il est lié par les poignets...
Abashiri Bangaichi, mythique saga cinématographique composée de dix-huit films réalisés entre 1965 et 1972, fait aujourd’hui partie des « meubles » du cinéma populaire nippon. Qui aurait pu prédire à la Tôei, qui au départ ne croyait pas du tout au projet, que le premier épisode réalisé sous d’énormes contraintes budgétaires par Teruo Ishii deviendrait un tel succès que trois volets (Zoku Abashiri Bangaichi, Abashiri Bangaichi Bokyo-hen et Abashiri Bangaichi Hokkai-hen [1]
) seront réalisés la même années par le même Ishii ? Fort de ce triomphe inespéré, les opportunistes dirigeants du studio décident donc de tourner autant de suites que le public en décidera... Teruo Ishii jettera l’éponge après Abashiri Bangaichi Fubuki no Toso, dixième épisode sorti quant à lui le 23 décembre 1967.
Dans le cinéma nippon, le « film de prison » peut revêtir différents aspects ; du pur film d’exploitation (Elle s’appelait Scorpion /Joshuu Sasori Dai 41 Zakkyobô de Shunya Ito), au pamphlet contre le système carcéral (Doing Time /Keimusho no Naka de Yoichi Sai), en passant par le brûlot politique dévastateur (Koshikei /La Pendaison de Nagisa Oshima)... Abashiri Bangaichi se situe quant à lui dans la grande famille du film de Genre, en l’occurrence ici, le film de prison dans sa forme plus « classique »...
...Tachibana a tout du parfait héros nippon, du vrai mâle dont l’honneur compte plus que tout. Enfant malheureux, il erre avec sa pauvre mère et Michiko sa petite sœur sur les routes d’un Japon d’après-guerre dévasté... le temps passe, et leur beau-père s’avère être un alcoolique violent. Tachibana se révolte contre sa condition et s’enfuit en ville pour rejoindre le monde de la pègre, tout en ayant promis à Michiko qu’il reviendrait la chercher un jour... Lors de sa détention à Abashiri, Tachibana apprend que sa mère est atteinte d’un cancer du sein, et qu’elle n’en a plus pour longtemps. Le jeune homme décide donc de tout faire pour la rejoindre, mais les rouages de l’administration pénitentiaire sont difficile à dégripper, et le temps ne joue pas en sa faveur... Tachibana, après avoir pensé à l’évasion, comprend qu’il risque gros et décide d’attendre la fin de sa peine, non sans impatience... Alors que la date de sa libération approche, Tachibana est entraîné malgré lui dans une vaine cavale qui annihile tous ses espoirs...
Ce premier épisode des aventures de Tachibana dans la prison d’Abashiri contient son lot de séquences cultes, telle cette mémorable poursuite en wagonnets dont les freins ont lâché -qui pourrait par certains aspects faire penser au Runaway Train d’ Andrei Konchalovsky (d’après un scénario original écrit par Akira Kurosawa). Fort d’une structure relativement classique, Abashiri Bangaichi alterne flashbacks et séquences en prison, afin de façonner le caractère de Tachibana, un homme rebelle et tourmenté par un passé traumatisant, prêt à tout pour retrouver les deux femmes qu’il aime, y compris la compromission.
Abashiri Bangaichi offre à Ken Takakura un rôle qui va le propulser au rang de star masculine numéro un au Japon, apprécié des hommes qui voient en lui un modèle de masculinité, et des femmes qui apprécient cet Homme fort et sensible, prêt à tout par amour... ahhhh, c’est beau ! A ses côtés le grand Kanjurô Arashi, l’inimitable et génial (gé-ni-aaaaaaaaal !!!) Kunie Tanaka, ou encore le grand Tetsurô Tanba qui porte mieux que personne le manteau, la toque et le fusil sous la neige...
Excellent film de prison qui nous plonge dans l’esprit tourmenté d’un jeune homme indomptable, Abashiri Bangaichi, relecture nippone de The Defiant Ones (La Chaîne de Stanley Kramer) noire et épurée, s’impose comme un film réaliste à la violence aussi froide que les contrées glaciales d’Hokkaidô...
Note : en 1959, Akinori Matsuo réalisa Abashiri Bangaichi sous l’égide de la Nikkatsu avec Yûji Okada dans le rôle principal ; une adaptation également tirée de l’histoire créée par Hajime Itô...
DVD (Japon -pas vu) | Tôei Video | NTSC - Zone 2 | Format : 1:2:35 - 16/9
Ce DVD ne comporte pas le moindre sous-titre.
Existe également en VHS (NTSC) chez Tôei Video au Japon.
[1] Respectivement sortis les 10 juillet, 31 octobre et 31 décembre 1965.


