L’Héritage des 500 000
Mie Hama, Yuriko Hoshi, Tatsuya Nakadai
Matsuo est l’une des rares personnes encore en vie à savoir où plusieurs milliers de pièces d’or ont été enterrés dans la jungle philippine à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Près de 20 ans après la défaite, un homme d’affaires, Mitsura Gunji, lui propose de partir à la recherche du butin. Doutant des belles paroles de ce dernier, il refuse avant d’être contraint sous la menace de partir à la recherche du butin. Matsuo revient sur les lieux où il a vécu une expérience qui a changé sa vie. Il est accompagné de quatre hommes recrutés par Gunji, mais ils ne sont pas les seuls à convoiter cet or.
L’Héritage des 500 000 constitue une curiosité cinématographique en tant que seule et unique mise en scène de Toshiro Mifune. Derrière la caméra, la star bénéficie du soutien de plusieurs membres de l’équipe technique d’Akira Kurosawa, le scénariste Ryuzu Kikushima, le directeur de la photographie, Takao Saito… Le Maître lui-même aurait même donné des conseils. Le film possède ainsi une qualité d’écriture, de photographie, de montage qui lui permet de traverser les années de belle manière.
J’aime beaucoup comment Mitsura Gunji et Matsuo - interprétés pour notre bonheur par Toshiro Mifune et Tatsuya Nakadai - sont rapidement caractérisés lorsqu’ils nous sont présentés. Le comportement du chauffeur du premier dans la circulation en dit beaucoup sur son patron, soi-disant un homme d’affaires, de même que l’attention de Matsuo au gaspillage d’une de ses employées.
Un trésor disparu, une contrée exotique, une peuplade hostile, des bandits… L’Héritage des 500 000 possède tous les ingrédients d’un film d’aventure. Les péripéties des protagonistes sembleront cependant trop fades aux spectateurs habitués aux films d’aventure contemporains.
Mais la soif de l’or qui anime ses quatre compagnons est plus dangereuse que la jungle dans laquelle ils s’enfoncent. Le film prend alors une autre dimension. Après une série de rebondissements, les cinq hommes connaissent les affres d’une fuite sans ravitaillement, qui met leur âme à nue.
Matsuo en a déjà fait l’expérience pendant le conflit mondial dans des conditions plus atroces encore et elle l’a marquée à jamais. Cet épisode a fait de lui un homme profondément honnête et altruiste, à l’inverse du frère de Mitsura. La personnalité de l’autre figure dominante du commando a aussi été forgée par ses années en tant que soldat, mais trahi par ses chefs, il a perdu sa foi dans les hommes.
Le plus jeune membre de la bande, qui appartient à la génération née juste avant ou pendant la guerre, est tiraillé entre ces deux hommes. Il est en particulier impressionné par l’assurance de Matsuo.
En tant que metteur en scène, Toshiro Mifune donne une vision de la guerre qui est rare dans le cinéma japonais de l’époque. Le film débute sur une bande d’actualités montrant des cadavres de soldats japonais et à plusieurs reprises, le commando découvre les os de combattants nippons morts et laissés sans sépulture. Dans la scène la plus émouvante du film, ils prennent le temps des enterrer.
Il évoque également ces soldats japonais qui ne sont jamais retournés dans leur pays natal après la fin du conflit [1]. Leur situation fera l’objet de plusieurs documentaires de Shohei Imamura au début des années 70 [2].
L’Héritage des 500 000 est disponible en DVD et Blu-ray chez Carlotta Films.
Remerciements à l’éditeur.




