Je ne peux pas vivre sans toi
Never back down.
Même si vous avez pu le voir jouer dans des films, Betelnut Beauty notamment, Leon Dai est encore un inconnu dans nos contrées, mais cela pourrait changer. Il a fait main basse sur les Golden Horse Award 2009, l’équivalent taiwanais des César, en remportant 4 statuettes, dont celles du meilleur réalisateur et du meilleur film avec Je ne peux pas vivre sans toi, son deuxième long métrage.
Wu-hsiung vit avec sa fille de 7 ans sur les quais du port de la deuxième ville de Taiwan. Ils survivent grâce à son travail de plongeur sous-marin au noir. Ils vivent chichement, mais heureux jusqu’au jour où il doit l’inscrire à l’école. Il découvre que c’est impossible car, même s’il est son père biologique et que la mère a abandonné sa fille, il n’est pas son tuteur légal. Pour l’inscrire, il doit obtenir l’autorisation de la mère. Après avoir cru pouvoir obtenir une dérogation grâce à l’entregent de l’un de ses camarades d’école devenu homme politique, il va se heurter aux règlements de l’administration. Poussé à bout, il menace de se jeter avec sa fille d’un pont au-dessous duquel passe la circulation de Taipei.
A l’heure où, pour être pris au sérieux par les spectateurs, les metteurs en scène réalisent des films longs et complexes, le deuxième film de Leon Dai se distingue par sa simplicité. Pourquoi faire compliqué, quand le bonheur des principaux personnages est aussi simple ! Ce qui intéresse Leon Dai, ce sont ses personnages et leurs sentiments. J’aime bien ces petits riens qui montrent la complicité entre la fillette et son père. La fillette détournant son regard de la caméra pour enfoncer son visage dans le dos de son père alors qu’ils sont à moto. Une moto qu’elle poussera un peu plus tard, au moment de s’enfuir d’une école où ils ont dormi sans autorisation en revenant de Taipei.
Au détour d’une scène, on est surpris par un plan, qui, isolé du film, pourrait appartenir à un vieux film néoréaliste. Si notre eurocentrisme nous fait associer le néo-réalisme au cinéma italien de l’après-guerre, les studios de Shanghai en faisaient sans l’appeler ainsi dans les années 30. Je ne peux pas vivre sans toi est filmé dans un noir et blanc, qui refuse à la fois l’esthétisme et une approche trop documentaire. Il fonctionne comme un filtre polarisant inversé, empêchant le spectateur de se focaliser uniquement sur la situation précaire du père et de la fille. Le réalisateur parvient à ce que le bonheur du père et de sa fille ne soit pas submergé par leur situation difficile. Leon Dai instaure ainsi un équilibre à l’écran, à l’image de la situation vécue par ses deux personnages principaux : leur vie est difficile, mais elle est aussi heureuse.
Cela peut paraître un cliché, mais si l’histoire se déroule à Taiwan, elle a également valeur universelle. Malgré sa ténacité, le père est piégé par une administration incapable de faire un geste d’humanité.
Je ne peux pas vivre sans toi sort sur les écrans de l’hexagone ce mercredi 27 octobre 2010.
Il est par ailleurs déjà disponible en DVD, sous-titré anglais, à Taiwan, où il sera très prochainement (le 19 novembre) réédité en Blu-ray.




