Kizudarake no Tenshi
Virée poétique à travers le Japon de deux héros pathétiques en quête de bonheur...
Mitsuru Kida est détective. Alors que les factures s’entassent sur le bureau du limier, Genta Adachi, un propriétaire, fait appel à lui pour lui confier un travail ; expulser un dénommé Kurai d’un immeuble. Ce dernier trempant dans un trafic de drogue, Adachi demande à Kida de trouver des preuves concernant ce business illicite pour le dénoncer à la police. Le détective saute sur l’occasion sans faire la fine bouche... Malheureusement pour lui, arrivé sur place il est témoin d’un meurtre. La victime, qui n’est autre que Kurai, agonisant, demande à notre pauvre détective d’emmener son jeune fils Hotaru à sa femme...
Kida et son compère Hisashi, parcourent alors les routes du Japon avec le petit garçon, lorsqu’un beau jour, ils retrouvent sa mère. Celle-ci a refait sa vie, et ne veut pas de son fils... Nos trois compagnons vont alors aller de rencontre en rencontre ; une équipe de catcheurs, une jeune et jolie esthéticienne... pour finalement arriver chez le grand-père paternel du petit... Ils y laissent l’enfant, non sans tristesse, puis repartent sur les routes.
Mais ce que ne savent pas nos deux associés, c’est que le meurtrier de Kurai est à la recherche du témoin du crime, afin de l’éliminer...
Les films de Junji Sakamoto [1]
se suivent... et ne se ressemblent pas spécialement ! De son premier long-métrage Dotsuitarunen (Knock Out ! /1989), l’histoire d’un champion de boxe déchu qui tente tout pour redevenir le meilleur, à son dernier en date Bokunchi (2002), qui conte quant à lui le quotidien de deux garçonnets et leur petite soeur vivant seuls dans un village de pêcheurs, on peut dire que le maître mot qui définit l’œuvre de cet homme est l’éclectisme. Pourtant, une sorte de fil conducteur semble tisser l’œuvre de ce réalisateur majeur du cinéma nippon actuel ; Sakamoto aime ses congénères, c’est indéniable, et son univers cinématographique est l’un des plus riches tant sur le plan humain qu’émotionnel...
...et ce n’est pas Kizudarake no Tenshi qui me fera mentir ! Septième long mis en scène par Junji Sakamoto, vaguement inspiré de la série TV éponyme des seventies [2], il s’inscrit dans l’évolution naturelle du cinéaste vers un cinéma altruiste. Ses deux héros, n’ont rien d’ "héroïque"... non, leur comportement est celui d’hommes "normaux", confrontés à des peurs mais également à des désirs ; désirs - non calculés - de rendre heureux ceux qui les entourent... Nos deux "anges" sont de grands enfants, et l’idée même d’aider leur prochain à des fins autres que naturellement philanthropique ne les effleure jamais. Ils sont victimes de leur sensibilité... voir même de leur candeur. Lorsqu’ils quittent le petit garçon, la séparation est un véritable déchirement, une véritable plaie béante dans le cœur de ces deux hommes qui se retrouvent toujours au mauvais endroit, au mauvais moment, dans des situations qu’ils ne maîtrisent pas...
Pour incarner ses deux anges blessés, Junji Sakamoto a fait appel à deux nouveaux venus dans sa famille cinématographique ; le premier, Etsushi Toyokawa, y interprète brillamment Mitsuru Kida. Outre les films de Sakamoto (Kao, Shin Jingi Naki Tatakai) on a pu le voir chez Takeshi Kitano (3-4 x Jugatsu), Sogo Ishii (Angel Dust) ou encore Shunji Iwai (Undo, Love Letter), pour ne citer qu’eux. Quant au second, Kuroudo Maki, qui prête ses traits à Hisashi Ishii, il a participé à deux autres films de Sakamoto (Orokamono - Kizudarake no Tenshi, Bokunchi), mais on l’a vu également chez Kitano (Ano Natsu, Ichiban Shizukana Umi, Brother) ou Takashi Ishii (Tôkyô G.P.)...
A leurs côtés, une distribution aussi "énaurme" et variée que Tomoyo Harada (Toki o Kakeru Shôjo, Watashi o Sukî ni Tsuretette) aidoru/chanteuse/actrice ultra méga populaire des 80’s, le musicien touche à tout [3]
Ryûdô Uzaki (Sonezaki Shinju, Totsunyuseyo !Asama Sanso Jiken), l’excellent Bunta Sugawara (Jingi Naki Tatakai, Taiyô wo Nusunda Otoko) ou encore Kimiko Yo (Nûdo no Yoru, Gonin 2)...
A mi-chemin entre la comédie et le drame, Kizudarake no Tenshi empli le spectateur d’un bonheur intense grâce à l’émotion réelle et honnête qu’il dégage. Ses héros, naïfs, émouvants, humains, sont des clowns blancs, des anges blessés, scarifiés, abandonnés... Il y a du Midnight Cow-Boy [4] dans ce film ; le même désespoir nonchalant, en même temps qu’une beauté palpable dont découle inévitablement un sentiment de perfection...
DVD | Shochiku Home Video | NTSC | Zone 2 | Format : 1:1:85 - 4/3 | Images : Un beau pressage sans défauts... auquel l’absence de 16/9 fait pourtant défaut ! | Son : Excellent mono. | Suppléments : Making of (13’33’’), cast & staff profiles et le trailer... en 16/9 ! Allez comprendre...
Ce DVD ne contient pas le moindre sous-titres.
Bonus
Pour tout savoir de Bokunchi, le dernier film de Junji Sakamoto... http://www.bokunchi.jp
Site Officiel de Ryûdô Uzaki : http://www.ryudo.jp
[1] Cf. articles Tokarev et Kao.
[2] Kizudarake no Tenshi, avec Kenichi Hagiwara et Yutaka Mizutani, dont les 26 épisodes furent diffusés entre le 5 Octobre 1974 et le 29 Mars 1975 sur Nihon Terebi.
[3] Il réalisa même deux films dont, en 1992, le très fameux Sakana Kara Daiokishin ! (Dioxin from Fish !) avec Yûya Uchida et Masahiro Motoki. Son dernier projet, un spectacle de Bunraku (marionnettes) traditionnel - Rock Sonezaki Shinju- avec une bande son rock ! Cf http://www.ryudo.jp/sonezakishinju2003.html.
[4] Macadam Cow-Boy - John Schlesinger /1969.



