Opapatika
Etes-vous vraiment prêt pour l’immortalité à la thaï ?!
Le monde réel des mortels touche à sa fin, les opapatika veulent prendre le pouvoir, en particulier le doyen de tous : Sadok. Attendez, un semblant d’explications s’impose avant de continuer le résumé. Il existe quelques mortels possédant chacun un pouvoir différent caché. Pour le libérer il suffit de se suicider, le cadavre se réveille, il est immortel et doit découvrir par lui-même sa nouvelle capacité, mais il y a un revers maléfique à cette aptitude.
Ainsi Sadok convainc Techit, un détective, de devenir lui-même un opapatika pour retrouver un groupe d’opapatika puissants et notamment le dénommé Jiras. Secondé par un mercenaire humain à la tête d’une armée, il se met en chasse tout en apprenant à maîtriser son pouvoir de télépathie.
Sous ses abords de jeu vidéo au principe de base plus qu’original, Opapatika laisse un goût amer de film un peu raté. Passons sur l’incohérence des rapports entre Techit l’enquêteur, Sadok le vieux mystérieux et son bras droit le mortel Thanachit. L’incohérence des motivations de chacun est flagrante, la plupart n’en ayant absolument pas puisque seulement Sadok doit se nourrir de la chair d’un immortel pour continuer à vivre. Que pousse donc le mercenaire à poursuivre sans relâche des êtres qui pourraient le massacrer cent fois ? Qu’est-ce qui a forcé Techit à désirer cette nouvelle non-vie ? Fichtre que tout ceci est flou, à croire que le réalisateur n’éprouve aucune sympathie pour ses personnages et, pire, pour ses spectateurs. Quant aux motivations des soldats qui, sous l’effet de drogues aphrodisiaques et hallucinatoires, foncent tête baissée (ce n’est pas une image !!!) sur des opapatika les mettant systématiquement en charpie. Il faut le voir pour le croire et même le compter pour en être sûr. A plusieurs reprises, tous ces décérébrés sans aucune stratégie d’attaque ou de repli se laissent inlassablement déchiqueter de la même façon. Dur dur le métier de soldat en Thaïlande.
Mais en fait la grande majorité des défauts du film est accentuée par la mise en scène épouvantable et brouillonne de Thanakorn Pongsuwan. Dans la lignée d’un Born to Fight et d’un Ong-Bak et autres films d’actions en provenance directe d’Asie depuis quelques années, la mise en image de bonnes idées est confiée à des tacherons à l’esbroufe pompière bien calibrée.
Techit est sensé mener une enquête mais on ne le voit jamais le faire. Il doit mettre la main sur des immortels qui vivent le plus clandestinement possible et il lui suffit de pousser une porte au hasard pour tomber sur deux d’entre eux… heureusement qu’il était accompagné de 150 soldats demeurés. A vouloir trop envoyer de poudre aux yeux dans la profusion de saynètes d’actions, le réalisateur met de côté la cohérence narrative.
Le pénible montage haché des chorégraphies de close combat fait sombrer à chaque minute le métrage. Pas moins de cinq monteurs se sont succédés ou « entraidés » pour nous livrer cette bouillie de gros plans, filtrés sans arrêt en dépit du bon sens et bien trop peu éclairés. C’est vrai qu’il faut avouer que des séquences aux décors somptueux pâtissent d’un faible éclairage, d’autant plus que le tout est copieusement arrosé de pluie… irregardable.
Pourtant, pourtant en y réfléchissant, je ne suis pas sûr d’avoir passé un si mauvais moment… Aaah si : j’avais oublié tous ces soldats qui courent dans tous les sens en écoutant un orchestre philharmonique. Bon là je suis tatillon, un peu quand même. Tout ceci est bel et bien dommage, car la promesse d’un film d’action rondement mené avait un point de départ vraiment original : l’idée de se suicider pour acquérir un pouvoir.
En 1h50, Opapatika reste une valeur sûre du cinéma d’action, un brin plus intelligent que les dernières productions fadasses citées au dessus. Faire encore mieux aurait été simple car Opapatika aurait pu prendre une dimension quasi biblique à plusieurs moments clés du film, mais chaque fois qu’une chose devient un minimum exaltante, elle est tout de suite démontée par des vices de forme. Et le pire est ce final torpillé en 10 secondes, montre en main. Quel gâchis !!
Opapatika a été présenté en compétition dans la sélection Action Asia de la dixième édition du Festival du film asiatique de Deauville (2008).



