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Rise

aka Rise – Blood Hunter | USA | 2007 | Un film de Sebastian Gutierrez | Avec Lucy Liu, Michael Chiklis, James D’Arcy, Carla Gugino, Mako, Allan Rich, Margo Harshman

Sadie Blake (Lucy Liu) a de quoi être contente : son papier sur la communauté goth de Los Angeles lui offre enfin la première page de son journal. Son travail d’investigation terminé, elle n’est pas plus intéressée que ça par la trouvaille de son collègue Ethan, qui déterre une adresse cachée dans un site web lié à la jeune Tricia, l’une de ses sources d’information, où devrait avoir lieu une séance nocturne « d’alimentation », très connotée vampirisme amateur… Lorsque Tricia est retrouvée morte et qu’Ethan disparaît, Sadie se replonge malgré elle dans l’affaire, au grand bonheur d’un certain Bishop dont elle a fini par attirer l’attention meurtrière. Car Bishop, la délicieuse Eve (Carla Gugino) et leur clique sont de véritables vampires, friands d’anonymat autant que de sang humain. Quand Clyde Rawlins (Michael Chiklis), flic et père éploré de Tricia, referme un sac mortuaire sur le cadavre de Sadie, il est loin de se douter qu’elle va se réveiller quelques jours plus tard à la morgue, pas ravie d’être devenue hématophage et bien décidée à se venger de ses nouveaux congénères…

Bien que son premier long-métrage, Judas Kiss, ait en son temps fait son petit effet – remportant même le prix de la critique au feu Festival du film policier de Cognac – Sebastian Gutierrez est resté un auteur-réalisateur discret [1]. Timide même, puisque Rise, son second film pour le grand écran, s’est fait attendre pendant près de dix ans. Marqué par l’affranchissement de toute velléité sur-commerciale, Rise qui, comme l’ensemble des films de Guttierez (pour la plupart inédits en France), est un film de femmes, et si possible d’actrices de second rang, bénéficie de la sympathie de ces œuvres sans prétention qui, du coup, ne souffrent pas vraiment d’écueil.

Précédant de loin la vague vampire qui scintille / mordons-nous les lèvres qui entoure le phénomène Twilight, Rise est un film de vampires atypique, sans canines aiguisées, gousses d’ail ou romantisme baroque. Même l’érotisme, pourtant indissociable du mythe, est assez éthéré dans les mains de Gutierrez, réduit à une évocation subliminale de l’émotion qui traverse Eve lorsqu’elle constate combien, même exsangue, sa proie Sadie s’accroche à l’existence. Il n’est pas question ici de mélanger l’instant de mort et l’orgasme : tranchant la gorge de leurs victimes, leur ôtant quelque membre sans décorum, les vampires de Rise sont de simples meurtriers. Normal, puisque le film est plus Noir, finalement, que d’horreur.

C’est certainement cette retenue qui rend l’attitude de Sadie, non-morte, globalement crédible. Passons sur l’intermède de l’Alchimiste, ridicule mentor censé avoir fait de notre héroïne une redoutable guerrière à même de venir à bout de Bishop et ses sbires, pour profiter de son impossible réticence à sa condition. Le premier meurtre commis par Sadie pour se nourrir, sans emphase de mise en scène, est empli d’un dégoût qui ne la quittera presque jamais, puisqu’elle ira même jusqu’à tenter de se suicider. Lucy Liu, d’ordinaire cantonnée au statut d’eye-candy, est pour le moins mise à mal par Gutierrez. Si le réalisateur, conjoint de Carla Gugino dans la vie, ne cesse de la dévêtir, c’est pour mieux la fragiliser, renforcer son extinction émotionnelle. Puisqu’elle ne s’émeut pas de pendre nue par les pieds, d’être exposée à la morgue, puisque le cœur n’est plus, le regard porté sur sa beauté par le spectateur devient lui aussi tout autre.

Le problème, peut-être, est que le film s’efforce tant de faire preuve de restreinte, jamais grandiloquent ou spectaculaire, rageur ou vindicatif, qu’il existe finalement dans une étrange neutralité émotionnelle – que ne contredira pas le peu d’envergure de Michael Chiklis dans le rôle de Clyde, le héros de The Shield étant pourtant d’ordinaire synonyme d’une certaine impulsivité. Une neutralité toutefois en phase avec la condition si particulière de son héroïne, dénuée d’apparat et de pose, qui permet à quelques scènes – comme l’exécution d’Eve, percée de sentiments inattendus et de flashbacks de la première mort de Sadie ; ou cette idée que même morte, Sadie a perçu le regard de Clyde sur son cadavre – de se détacher du lot. Le cinéma de Gutierrez est à l’opposée de la majorité de ses contemporains boursouflés, créant le sursaut par le truchement de la constance. Une modestie de facture légèrement télévisuelle, certes, mais fort attachante.

La version critiquée ici n’est pas la version longue (122 min) mais celle, sortie en salle, de 98 min. Sans doute avais-je récupéré le film dans une édition discount, alors qu’il est disponible « uncut » en DVD et BR chez nous.

[1Les français le connaissent mieux, sans le savoir, pour son travail de scénariste, notamment sur Gothika, Des serpents dans l’avion, ou le remake américain de The Eye.

- Article paru le jeudi 26 avril 2012

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