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Japon

Comic Magazine

aka Komikku Zasshi Nanka Iranai ! - No More Comics ! - We do not Need Comic Magazine - Comic Zasshi Nanka Iranai ! | Japon | 1986 | Un film de Yôjirô Takita | Avec Yûya Uchida, Yumi Asou, Yoshio Harada, Eriko Watanabe, Taiji Tonoyama, Beat Takeshi, Stevie Harada, Hiromi Gô, Tsurutarô Kataoka, Masahiro Kuwana, Rikiya Yasuoka, Katsuyuki Shinohara, Rikako Murakami, Kaoru Oda, Daisuke Shima, Kiriko Shimizu, Hairi Katagiri, Masataka Itsumi, Kazuyoshi Miura, Yutaka Ikejima, Hiroshi Saitou, Kaori Momoi, Onyanko Kurabu, Seiko Matsuda, Tamori

La Société du Spectacle made in Japan...

Kinameri est journaliste... enfin "journaliste", c’est un bien grand mot ! Il est reporter de scoops dans le monde du showbiz. Prêt à peu près à tout et n’importe quoi pour arriver à ses fins, il est la bête noire des stars ; en véritable sangsue, il traque ses proies dans les moindres recoins et ne leur laisse aucune chance - puisque lorsque ses victimes ne répondent pas à ses questions, il leur alloue des propos qui ne sont pas les leurs, uniquement basés sur ses suppositions, pour ne pas dire ses fantasmes...

Un beau jour, ses facéties le font arrêter par la police. Sorti de son très court séjour derrière les barreaux, il est écarté des prime time et exilé vers un créneau horaire tardif. Puni par ses supérieurs, il se retrouve dans la case "reportage coquins" et s’enlise peu à peu dans le monde de la nuit, du sexe, des gigolos et des magouilles, découvrant ainsi une autre facette de la vie...

...accès de conscience furibond ? Toujours est-il qu’il se met à enquêter sérieusement sur une affaire de vol perpétré par une société "vendant" de l’or, principalement à des personnes âgées... mais très vite, son producteur sentant le filon lui donne carte blanche et lui demande d’en faire plus, encore plus... et toujours plus...

There’s no business like show business !

Pamphlet jubilatoire au même titre qu’une violente claque dans le paysage filmique japonais, Komiku Zasshi Nanka Iranai ! (KZNI !) est inspiré d’un fait véridique qui remua le monde de la presse nippone en 1985...

...dès les premières images le ton est donné ! Le spectateur est pris à partie par une voix. C’est celle de Yûya Uchida [1], instigateur, co-auteur et acteur principal du film. Seul à l’écran, son visage en gros plan nous fait face. Tandis que des mains féminines lui coupent les cheveux, il explique en off, non sans un certain cynisme à peine dissimulé, que ce KZNI ! est le fruit un peu particulier et improbable, né de l’esprit critique et acerbe de trois hommes. Yûya Uchida, figure emblématique de la scène rock nippone et grande gueule notoire, s’attelle à l’écriture du script avec l’aide d’Isao Takagi, célèbre scénariste de films pornographiques et d’un roman poruno de la Nikkatsu qui mêle sexe et SF, Time Abanchiûru Zekkou 5 Byou Mae... bref, deux hommes faits pour se rencontrer. Le scénario écrit, encore fallait-il trouver un homme capable, mais surtout qui ose réaliser ce brûlot atypique. Un seul, "suffisamment dingue" selon Uchida, accepte. Yôjirô Takita, "pornographe" qui officie alors depuis 1978 dans l’industrie du X nippon, qui réalise pas moins de vingt-deux oeuvres entre 1981 et 1986, dont la série des Chikan Densha (The Train of Molesters - que de réjouissances ! - produite par la Shin Toho) - onze épisodes - dont la fixation sur les parties charnues des actrices est l’un des attraits principaux (Rumiko no Oshiri, Momoe no Oshiri, Seiko no Oshiri, etc... [2]), et, plus récemment, des films à caractère beaucoup moins sexuel tels Bokura wa Minna Ikiteiru (1993), Ojuken (The Exam /1999), et les fameux Himitsu (Secret /1999) et Onmyouji (2001)... Uchida assène le public d’un dernier : "(...) pour des raisons de sécurité il vous est interdit de faire l’amour dans cette salle (...)". Il n’y a rien à ajouter, le film peut commencer...

That’s Entertainment !

Pendant deux heures, nous suivons donc les pérégrinations et états d’âmes d’un homme au parcours professionnel sinueux... Sadomasochisme et autodestruction, sont les deux mamelles de Kinameri, sorte de condensé vivant de ce que le "journalisme" peut engendrer de pire - dans un premier temps tout du moins...

A peine le film débuté, nous sommes en caméra embarquée avec Kinameri et son équipe technique. Le lieu : aéroport de Tôkyô. La victime : Kaori Momoi (Ryoma Ansatsu, Shiawase no Kiiroi Hankachi), une célèbre actrice. Kinemari, tel une mouche accrochée à un bout de viande, ne cesse de l’asséner de questions quant à sa vie privée... Momoi feint l’indifférence, et Kinameri n’obtient pas un mot, ni même un regard de l’actrice. Sur le plateau de l’émission dans laquelle il intervient, Kinameri n’hésite pas à "déduire" publiquement que son silence équivaut à une approbation... Le personnage du reporter people est donc très vite cerné par le spectateur...

...et si tout ceci n’était qu’une illusion ?

C’est la question que l’on peut se poser... Comment un homme peut-il agir ainsi ? Véritable paria au sein de sa propre profession, il n’est plus que le fantôme d’un être humain, réduit à l’état de servitude par des producteurs peu scrupuleux dont le seul mot d’ordre est l’audimat.

...descente aux enfers...

Kinameri va se retrouver rapidement face à lui-même et à l’image qu’il renvoie, dans son entourage professionnel et personnel... si l’on excepte son jardin secret, qui donne d’ailleurs droit à des scènes de toute beauté, teintées d’un onirisme proche de la poésie pure... C’est seul, qu’il va prendre conscience de ce qu’il est et de ce qu’il représente. Il va alors tenter de se prouver ce dont il est capable, et enquêter sur un sujet au premier abord inintéressant pour ses collègues, car "pas assez vendeur et racoleur"... Mais l’appât du scoop va très vite reprendre le dessus, et les rapaces vont se jeter sur l’affaire qui, devenue sordide doit éclater au grand jour.

...and now, the real-trash TV

[Faits réels] Le gérant de la société mouillé dans l’affaire, s’est cloîtré dans un appartement devant lequel toute une cohorte de journalistes se sont agglutinés. Soudain, deux hommes font irruption. Ils proclament bien haut et fort qu’ils sont là pour l’assassiner... le meurtre est perpétré devant les caméras sans qu’aucun journaliste ne lève le moindre doigt...

...ou quand la réalité dépasse la fiction.

Kinameri, dans un élan qui ressemble à une sorte de prise de conscience paradoxalement mêlée à de l’inconscience, va intervenir dans la scène du crime, pour se retrouver lui aussi, jeté en pâture aux médias...

Le tour de force du film conçu par nos trois hommes est d’être une sorte de vitrine du showbiz, à la fois réelle et fantasmée ; certaines personnalités y jouent leur propre rôle tandis que d’autres y interprètent des personnages... tout en existant en tant que célébrités (confus ?...)... Véritable galerie de stars, on y croise dans des rôles, ou dans le leur, Yoshio Harada, Hiromi Gô, Beat Takeshi, Seiko Matsuda, Kaori Momoi, Tsurutarô Kataoka, Yumi Asô, Tamori et j’en passe, sans compter de véritables journalistes et yakuza (ne voyez aucun rapport entre les deux surtout !). On notera également une interview surréaliste du groupe Onyanko Kurabu (Onyanko Club - traduisez littéralement le "Club des Chatonnes" -, ancêtres des Morning Musume qui fonctionnaient sur le même "concept") qui interprètent leur tube Sêrâ Fuku o Nugasanaide (traduisez par "n’enlève pas mon costume d’écolière" ! [3]) lors d’une émission télé, devant un Kinameri médusé...

Diatribe d’une intelligence rare, Komikku Zasshi Nanka Iranai ! nous entraîne - non sans humour et cynisme - dans le processus d’autodestruction entrepris par les médias... Un film qui nous renvoie une image de la société, qui fait peur... alors qu’elle n’est que le reflet de la réalité.

DVD (pas vu) | Pioneer | NTSC | Zone 2 | Format : 1:1:85 - 16/9 | Son : Mono | Suppléments : Trailer, interview de Yûya Uchida (27’), commentaire audio du réalisateur et du producteur, trailers de 2 autres films de la Uchida Yûya DVD Collection (Jukkai no Mosukîto et Mizu no Nai Pûru), et un livret de 4 pages. | Ce DVD ne contient pas le moindre sous-titre.

Pour les curieux, voici la référence d’un CD Best of des Onyanko Kurabu, My Kore ! Kushion (réf. PCCA-01613). 16 chansons pour pas moins de 73 minutes de pur bonheur !

[1Cf. article Jukkai no Mosukîto.

[2Oshiri’ signifiant, comme vous vous en doutez certainement, ’fesses’.

[3Le fameux ’sailor fuku’.

- Article paru le lundi 21 avril 2003

signé Kuro

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