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Japon

Underwater Love

aka おんなの河童 - Onna no Kappa | Japon / Allemagne | 2011 | Un film de Shinji Imaoka | Avec Sawa Masaki, Yoshiro Umezawa, Mutsuo Yoshioka, Emi Nishimura, Ai Narita

Cette histoire, déclinée ou non avec la sympathique légèreté charnelle d’un pinku, on vous l’a contée maintes et maintes fois. Une femme, en passe de se marier, peut-être faute de mieux, avec son patron, voit ressurgir une figure du passé qui produit en elle un certain déclic, une hésitation. Soit. Mais si je vous dis que la figure en question est un défunt réincarné en kappa, tortue anthropomorphe facétieuse issue du folklore nippon, qui doit s’humidifier régulièrement le scalp et aime les combats de sumo, et que le tout se fait en chansons simplistes et chorégraphies infantiles, sous l’œil attentif de Christopher Doyle ? Vous vous dites alors, du moins je l’espère, que le Underwater Love de Shinji Imaoka, auquel notre confrère Tom Mes (Midnight Eye) a prêté sa plume gentiment timbrée, vaut le coup d’œil. Si vous n’êtes pas convaincu, sachez que vous y apprendrez comment piéger la grande faucheuse à l’aide d’une insertion rectale toute particulière. Et le savoir, ça ne se refuse pas, surtout quand il est emballé dans une telle bonne humeur.

Asuka (Sawa Masaki) donc, travaille dans un petit atelier de traitement de poisson dont elle s’apprête à épouser le libidineux patron. Un jour, alors qu’elle libère dans le port voisin un poisson qui a atterri encore vivant sur son plan de travail, elle tombe nez à nez avec un kappa. Celui-ci, pour le moins nonchalant, la connaît et pour cause : la créature n’est autre que la réincarnation d’Aoki, ami de jeunesse autrefois décédé de noyade. Les protagonistes renouent avec leur amitié d’antan. Mais l’une des collègues d’Asuka, qui vend ses rondeurs à la créature dans les murs de la maison abandonnée de ce dernier, découvre que cette relation dépasse la simple amitié. D’ailleurs, notre kappa trublion ne s’efforce-t-il pas de négocier avec un Dieu de la Mort pour protéger Asuka d’un imminent coup du sort ?

Dans Underwater Love, le Dieu de la Mort n’est qu’un hippie clope au bec, engoncé dans une robe bariolée et prêt à vendre quelque secret divin pour un verre de saké. Pas d’emballage inutile devant la caméra de Shinji Imaoka (Lunch Box) : dès les premières images du film, le spectateur est invité à remiser toute incrédulité au placard, et à accepter la réalité incongrue qui s’offre à lui. Sans emphase ni mystère, Imaoka ne tente nullement de nous convaincre d’une quelconque plausibilité ; nous montrant Aoki tranquillement assis dans les marais, il affirme simplement son existence. De même, il affirme sa sexualité, exhibe sans spectacle ni effet de mise en scène son membre verdâtre et ondulé qu’il offre à la gironde Mutsuo Yoshioka. Ce n’est pas bizarre, improbable, ou même obscène : c’est, tout simplement.

Dès lors, il devient trivial de se laisser embarquer dans cette histoire d’amour certes pour adultes mais foncièrement bon enfant. Les compositions musicales simplistes signées Stereo Total fleurent la comptine (tout de même introspective), et les chorégraphies qui les accompagnent – à peine embarrassées d’un playback – tiennent plus de l’improvisation minimaliste et rigolarde que du foisonnement à la Baz Luhrmann [1]. La photo de Doyle elle-même, singulièrement désaturée, lisse l’ensemble dans une banalité volontairement restreinte, faite d’espoir, d’honnêteté, et de sexualité littéralement vivifiante. Et si l’on est loin de la vision grandiose des yokai d’un Miike, la découverte par nos héros de l’antre des kappa – où un vieux sage au bec poilu leur confie une salvatrice perle anale évoquée plus haut ! – constitue une synthèse parfaite de la singulière poésie, cheap et touchante, de cet Underwater Love. On y rit comme ses personnages y chantent, dansent et adoptent une posture [2] qui tient, déjà, du signe de ralliement : sans excès, avec un peu de maladresse et de ridicule, mais avec beaucoup de bonheur et de naturel.

Underwater Love vient tout juste de sortir en DVD zone 2 UK chez Third Window Films, qui offre de plus la BO en CD. Vous savez ce qu’il vous reste à faire !

[1Normal, puisque le film, en pinku qui se respecte, a été emballé en à peine 5 jours, sans jamais recourir à une seconde prise.

[2Les jambes fléchies, les bras repliés sur les côtés (façon ailes de poulet) et les mains baissées. Le premier lecteur qui me salue de la sorte en pleine rue gagne un abonnement à vie à notre site.

- Article paru le mardi 22 novembre 2011

signé Akatomy

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