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Japon

Moon Child

Japon | 2003 | Un film de Takahisa Zeze | Avec Gackt, Hyde, Lee-Hom Wang, Zeny Kwok, Taro Yamamoto, Susumu Terajima, Ryo Ishibashi, Ann Suzuki

Takahisa Zeze est peut-être un nom qui ne vous dit pas grand chose et pourtant. Il s’agit d’un des réalisateurs de films érotiques japonais (pinku) les plus talentueux de sa génération (celle constituée par les Four Emperors of Pinku ou Kings of Pinku qui sont en fait les réalisateurs Hisayasu Satou, Toshiki Satou, Kazunoru Sano et Takahisa Zeze). Takahisa Zeze est donc loin d’être un anonyme.
Ces dernières années, il a laissé peu à peu tomber le pinku après un film-testament, Tokyo Erotica (probablement son œuvre la plus marquante à ce jour), pour s’orienter vers des genres divers (il avait déjà réalisé auparavant Kokkuri, Rush ! ou Hysteric) portant néanmoins souvent la marque du fantastique. Ainsi les récents Dog Star, SF Whipped Cream et le présent Moon Child.

La particularité de Moon Child, outre qu’il s’agit de la première grosse production de Zeze, est la présence des deux chanteurs Gackt et Hyde (respectivement des formations Malice Mizer et L’Arc-en-Ciel, et poursuivant maintenant des carrières solo) dans les rôles principaux, Gackt ayant de plus collaboré à l’écriture du scénario. Une particularité qui cristallise plus de craintes qu’autre chose vu le niveau exécrable souvent atteint par ce genre de star idolu de la chanson en terme de jeu d’acteur. Si Moon Child confirme que ni Gackt ni Hyde, dans une moindre mesure, ne sont des acteurs, Takahisa Zeze parvient à tirer son épingle du jeu et offre un film agréable qui n’est cependant pas exempt de défauts.

Kei (Hyde) est un vampire. Son père-vampire se laisse mourir le premier jour de l’an 2000 et Kei décide d’émigrer à Mallepa, ville asiatique cosmopolite qui en 2014, est devenu un repaire de pauvreté et de trafics en tous genres. En cette année 2014, il rencontre le jeune Sho et le prend sous son aile. Une douzaine d’années plus tard, Sho (Gackt) est devenu lui aussi un vampire et avec l’aide de Kei et Toshi, un livreur de pizza, ils s’attaquent aux gangsters de la ville pour leur dérober de l’argent. Un jour, ils rencontrent Son, un taiwanais, qui venait venger le viol de sa sœur Yi-Che au moment même où nos vampires attaquaient le même groupe de voyous. Les cinq personnes (Kei, Sho, Toshi, Son et Yi-Che) vont se trouver unies par l’amitié. Mais Yi-Che s’intéresse à Kei tandis que Sho est amoureux de cette dernière. De plus, Chan, responsable de la mafia taiwanaise locale, cause la mort de Toshi et Kei est forcé de dévoiler sa nature vampirique. Le groupe explose. Kei disparaît, Son rejoint la mafia taiwanaise et Sho finit par épouser Yi-Che. Neuf ans s’écoulent et Sho a maintenant une fille. Mais il entre en conflit avec Chan, et Kei refait son apparition...

Peut-être avez-vous l’impression que je vous ai dévoilé l’intégralité du film. Rassurez-vous, il reste bien des choses à découvrir. C’est d’ailleurs l’un des problèmes de Moon Child. Certainement trop ambitieux, le film ne comporte pas de ligne directrice claire et part plus ou moins dans toutes les directions (en plus des bonds dans le temps). Le mélange des genres, pas un mal en soit, est ici mal utilisé car plus qu’un mélange, Moon Child est un patchwork. Du film de vampires nous voici projeté en plein film de yakusa avant de sombrer dans l’histoire d’amitié et le sentimentalisme, la comédie dramatique en passant par la comédie tout court. Le foisonnement d’idées, bien que rarement très originales, fonctionne parfois mais souvent, une tendance à forcer sur le mélodrame rend le film poussif, long voire franchement ennuyeux.

En plus d’un patchwork stylistique, Moon Child va également puiser dans d’autres films son inspiration. Et l’ombre de Takashi Miike plane souvent sur le film. Mafia chinoise, rencontre de cultures différentes et violence sont des thèmes courants chez Miike que l’on retrouve ici. Moon Child ressemblant parfois de manière troublante à DoA : Final (malheureusement, pas le meilleur Miike !). Mais rendons à César ce qui lui appartient, Zeze n’est pas un simple copieur et Moon Child n’est pas Returner. C’est donc également la patte de Zeze lui-même qui est omniprésente. Ainsi l’anticipation, l’humour et l’immigration (ici de façon inverse, les Japonais étant la minorité) sont des thèmes puisés au cœur de son film précédent, SF Whipped Cream. En outre, le début du film et d’autres scènes évoquent nettement Tokyo Erotica (impression de fin du monde, caméra extrêmement mobile) ou certains passages de Rush ! et Hysteric (les effets de caméra notamment).

Moon Child est donc un film au bilan mitigé. Bourré de clichés souvent mal digérés (citons les gunfights, l’esthétique entre décadence et dandysme des vampires), d’un humour au raz des pâquerettes et surtout d’un manque de cohérence, il reste que la vision de Moon Child est loin d’être désagréable. Passée l’aversion naturelle envers Gackt, probablement un des plus mauvais acteurs actuels si tant est que l’on puisse le qualifier d’acteur, on prend vite un certain plaisir à ce curieux film qui ne sait pas trop où il va. C’est en partie dû à un côté souvent surprenant et passablement "bis", le tout noyé dans une trame floue qui multiplie les atermoiements mélodramatiques tout en se montrant parfois assez violente et même ingénieuse. C’est également grâce à un choix extrêmement judicieux des seconds rôles. Susumu Terajima (Ichi the Killer, The Blessing Bell) y interprète le frère aîné de Sho, Ryo Ishibashi (Audition) un flic désabusé, Koji Chihara (Rush !, Hysteric, 1-Ichi, Pornostar) forcément un voyou et enfin Ann Suzuki (Returner) y fait une petite apparition.

Si l’on passe sur Gackt qui passe son temps à surjouer (mal qui plus est mais il est là pour ça) et n’apparaît jamais le moins du monde crédible (il se prend parfois pour Wisley Snipes dans Blade, c’est dire !), Moon Child est un film qui mérite d’être vu, notamment car il s’agit tout simplement d’une véritable curiosité. A la fois affligeant (l’effet Returner) et touchant presque au génie, il montre par-dessus tout que Takahisa Zeze, s’il n’a pas encore fait véritablement la preuve de son talent hors du genre érotique, est un réalisateur fort capable dont on peut espérer le meilleur.

Moon Child est disponible en DVD au Japon, sous-titré en anglais.

Site officiel : http://www.moonchild-movie.com

- Article paru le vendredi 31 octobre 2003

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