Lors de la première édition des Rencontres du
cinéma asiatique de Paris (qui se sont tenues du 31 mars
au 4 avril 2004 au Mk2 Bibliothèque), la projection de Gozu
que Sancho a eu l'honneur de présenter, a été précédée
de la celle de Electric Yakuza go to Hell. Réalisé par Yves
Montmayeur (journaliste sur l'excellente émission Tracks
d'Arte entre autres, et ancien programmateur de l'Etrange Festival),
ce documentaire est en lui-même une première, puisqu'il s'agit du
premier documentaire consacré à Takashi Miike - tout du moins à
l'extérieur du Japon. Pour le présenter, le réalisateur/journaliste
était lui-même présent, accompagné d'un invité de choix : l'inégalable
Tom Mes, quant à lui auteur du premier livre sur Miike en langue
anglaise (Agitator, paru
chez Fab Press. Il est à noter que deux autres livres sur
le réalisateur sont aujourd'hui disponibles - en japonais uniquement).
Cette sympathique introduction déguisée en conversation, s'est articulée
dans un premier temps autour d'une présentation du parcours atypique
d'un réalisateur "improvisé", puis s'est concentrée sur les raisons
d'un intérêt disons, graduel. Une démarche progressive que Electric
Yakuza go to Hell, dans sa structure morcelée et non-linéaire,
illustre parfaitement.
Le documentaire de Montmayeur en effet, est un
montage d'interviews et d'images de tournages, glanées au cours
des quatre ou cinq dernières années. Certaines proviennent de l'époque
de la sortie d'Ichi the Killer,
d'autres du passage de ce dernier au BIFFF, d'aucunes de
la sortie d'Audition de par chez
nous; tandis que d'autres, exclusives, nous arrivent fraîchement
du plateau tout de bleu vêtu du tournage des scènes à
effets spéciaux de Zebraman. Cette
collision d'époques et de démarches, auxquelles se rajoutent d'excellentes
interventions de réalisateurs (Takeshi Kitano, Kinji Fukasaku,
Shinya Tsukamoto, Alejandro Jodorowsky, Pen-Ek Ratanaruang)
et d'acteurs (Show Aikawa, Tadanobu Asano, Kimika Yoshino, Hideki
Sone), confère une structure hésitante à l'ensemble. Montmayeur
regroupe sous un même chapitre des interviews d'époques différentes,
et fournit ainsi un portrait bizarrement oscillatoire de Miike.
On sent parallèlement que l'intérêt que le journaliste porte à son
sujet évolue, de la simple interview à la démarche proactive d'aller
assister au tournage de Zebraman
au Japon.
Du coup, cet atout "vivant" est aussi le principal
défaut de Electric Yakuza go to Hell. Car le documentaire,
en l'absence d'objectif critique ou analytique, n'en est plus vraiment
un; il a dû le devenir en cours de route mais souffre d'une double
identité que ses juxtapositions mettent constamment en exergue.
Il est néanmoins passionant car son sujet l'est, même si certains
lui reprocheront un montage et une réalisation très hype.
Quoiqu'il en soit, on ne peut que remercier Yves Montmayeur d'avoir
choisi de partager ces instants privilégiés avec nous!