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Hong Kong

Lost and Found

aka Tian Ya Hai Jiao | Hong Kong | 1996 | Un film de Lee Chi-Ngai | Avec Takeshi Kaneshiro, Kelly Chen (Kelly Chan Wai-Lam), Michael Fitzgerald Wong, Cheung Tat-Ming, Josie Ho, Jordan Chan, Moses Chan, Teddy Chan, Hilary Tsui

La UFO n’est pas vraiment une maison de production comme les autres. Créée en 1992 par un certain nombre de réalisateurs dont Eric Tsang Chi-Wai, Peter Chan Ho-San, le présent Lee Chi-Ngai et Jacob Cheung Sze-Lung, elle a toujours eu pour but de produire/réaliser des films modestes, avec des scénarios de qualité mais à la rentabilité hasardeuse. C’est ainsi qu’ont pu voir le jour Comrades, Almost a Love Story (Peter Chan, 1996), He Ain’t Heavy, He’s My Father (Peter Chan et Lee Chi-Ngai, 1993), ou encore Those Were The Days (Eric Tsang, 1996) - dans l’ensemble, des films aussi sobres que pertinents, qui fleurent bon la vie avec un réalisme savamment dosé. L’avant dernier film du réalisateur de Sleepless Town (1998), Lost and Found, n’échappe pas à cette règle...

Chai Lam (Kelly Chen) rencontre That Worm (Takeshi Kaneshiro) dans d’étranges circonstances : ce dernier est en train de fouiller dans une poubelle en plein milieu de la rue, tout en hurlant des indications à son interlocuteur au téléphone. Tête en l’air, "Mr. Worm" oublie son téléphone sur la poubelle, et Chai Lam le suit dans un restaurant pour le lui rendre ; elle en apprend alors un peu plus sur l’éboueur en herbe... That Worm (c’est son nom complet puisqu’il il est d’origine mongolienne) a de bonnes raisons d’explorer les détritus, puisqu’il a monté une société baptisée "Lost and Found", spécialisée dans la recherche de "choses" égarées. Je dis bien "choses", car ça peut aller du portefeuille à l’épouse, en passant, dans le cas de Chai Lam, par des choses aussi immaterielles que l’espoir.
En réalité, Chai Lam ne sait pas ce qu’elle recherche ; toujours est-il qu’elle aimerait retrouver Ted, un marin écossais-chinois (Michael SDU "Move move move !" Wong), dont elle a perdu la trace depuis plusieurs jours. Afin de l’aider, That Worm a besoin de quelques informations, la première étant la motivation derrière cette quête. Pour le spectateur, Chai Lam se remémore donc les évènements des jours qui ont précédé sa rencontre avec Mr. Lost and Found, en prenant pour point de départ le moment où son médecin lui apprend qu’elle souffre d’une leucémie...

Avec pour background une telle maladie, on pourrait bien sûr s’attendre à ce que Lost and Found soit un mélo à la Philadelphia (honte à vous monsieur Jonathan Demme), usant de moult ressorts éculés pour nous déshydrater pendant 110 minutes. Mais la leucémie du personnage interprété par Kelly Chen (-soupir-) ne prend jamais le premier plan du film ; épée de Damocles au-dessus de Chai Lam, qu’elle cherche à dissimuler auprès des gens qu’elle rencontre au cours de cette histoire, elle définit son comportement mais ne rythme pas directement la trame du film.
Ce que Chai Lam recherche, c’est une certaine magie de la vie, cette magie qui lui redonnerait l’espoir nécessaire à la lutte contre la maladie. Lorsqu’elle rencontre Ted (un rôle tout en douceur pour un Michael Wong finalement à l’aise sans son 4*4), le marin lui paraît assez léger pour qu’elle s’autorise à faire de lui ce magicien qu’elle convoite ; c’est sans doute pour cela qu’elle le visualise en train de jongler ou en train de faire le funambule, son côté "exotique" (il est né sur une île écossaise baptisée "le bout du monde" - traduction littérale du titre original du film) aidant à rendre le personnage "merveilleux".

Lost and Found joue habilement de son titre. Car c’est en perdant le personnage de Ted, qui est plus une construction de son esprit qu’une réalité, qu’elle trouve celui de That Worm. Si le jeune homme a fondé cette entreprise iconoclaste, c’est justement parce qu’il faut "qu’il y ait quelqu’un qui cherche les choses perdues pour que l’espoir demeure". C’est lui le véritable magicien, comme en témoigne cette séquence superbe où le duo se donne beaucoup de mal à satisfaire le souhait d’une petite fille. Celle-ci est à la recherche d’un type de canard bien particulier, dont les excréments pourraient faire bourgeonner le parterre de roses de son père - lesquelles fleurs aideraient sûrement sa mère à guérir. C’est dans ces moments-là que That Worm révèle l’essence même du bonheur au quotidien, cette magie qui peut faire de chaque un instant un moment d’exception. Et même s’il faut un certain temps à Chai-Lam pour assimiler cette clef de la vie - qu’elle qu’en soit la durée - il est des destinées auxquelles on ne peut échapper...

La réalisation sobre et le scénario impeccablement dosé de Lee Chi-Ngai n’auraient certainement pas la même portée sans les interprétations des acteurs retenus. Takeshi Kaneshiro (Lavender et Anna Magdalena - tous deux avec Kelly Chen, Space Travelers, The Odd One Dies) est parfait en naïf optimiste ; Kelly Chen (Hot War, Tokyo Raiders, Between Calm and Passion - et surtout une floppée d’albums exceptionnels en mandarin, cantonnais et même japonais) possède toute la douceur nécessaire à l’incarnation de cette femme secrètement malade, et même Michael Wong (Thunderbolt, First Option, Beast Cops) s’en tire avec les honneurs dans son rôle de marin conscient de ses "limitations" humaines.

Avec ses choix résolument optimistes (notamment dans l’utilisation de la voix-off de Kelly Chen) en dépit d’un sujet grave, Lost and Found parvient à toucher le spectateur de façon juste et durable, tout en ancrant en nous une nostalgie "par anticipation", parfois nécessaire pour saisir toute la magie de notre quotidien.

DVD Mei-Ah
Pas de menu, pas de chapitrage ; l’un des tous premiers DVDs sortis par l’éditeur et par conséquent très moyen : l’image est granuleuse et la compression approximative.
La bande-son est aux choix en cantonais ou en mandarin, en stéréo.
Les sous-titres anglais et chinois sont brûlés sur la pellicule... du travail ancestral !
Du coup, le VCD (sorti chez le même éditeur) est une alternative plutôt raisonnable en attendant une éventuelle réédition...

- Article paru le vendredi 24 mai 2002

signé Akatomy

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