Emmanuelle in Hong Kong
Lorsqu’une production Matrix Production Co. Ltd s’affranchit non seulement de la présence de Sophie Ngan, mais aussi de la nudité de Grace Lam, que reste-t-il de nos amours ?
Une première réponse - trompeuse - à cette question ne passe pas par de longs discours, mais par une illustration parfaitement éloquente (cf. plus bas à droite).
Je vois les fétichistes s’agiter sur leurs fauteuils, les fans des nonnes portugaises de Franco ne tardent pas à les rejoindre et pourtant... Hong Kong est peut-être le lieu, cinématographiquement parlant, de beaucoup de vices, mais quand Grace Lam dit qu’elle arrête de s’exposer, elle rentre carrément dans les ordres ! Et au risque de vous décevoir messieurs - ou mesdemoiselles, selon les goûts de chacun - autant vous dire qu’elle reste, pour son peu de temps à l’écran dans Emmanuelle in Hong Kong, parfaitement dans le rang.
A tel point qu’on y croirait presque.
C’est beau le cinéma.
Et oui c’est beau le cinéma - et surtout son substrat érotique en numérique - lorsqu’un homme très cochon mais capable de peu de discernement - Yan, notre "héros" ma foi peu sympathique - épouse une femme, Emily aussi croyante que pratiquante. D’un autre côté, ce penchant pour les galipettes exacerbées est-il antérieur ou conséquent à sa frustration, il convient de lui laisser le bénéfice du doute. Il n’empêche que Yan n’inspire pas confiance.
Ca ne vous étonnera pas du coup, si je vous dis que cet hyperactif du bas ventre embauche un noble débauché du nom de K - qui n’est ni familier de l’univers de Kafka, ni de celui de Dino Buzatti mais plutôt de celui d’Eyes Wide Shut en moins raffiné - afin qu’il séquestre sa femme trois mois durant dans son château, et l’initie de force aux plaisirs de la chair. Une initiation explicite et réussie, qui ne débouchera malheureusement pas sur le résultat attendu...
Et oui, car pendant que Yan pêche à droite à gauche, avec une occidentale vulgos ou des flopées d’asiatiques masquées et numérotées, et se découvre une véritable passion pour l’art érotique (hum...), Emily oublie sa frigidité supposée et confirme pleinement un penchant on ne peut plus lesbien ! Du coup Emmanuelle in Hong Kong a au moins le mérite d’être équilibré entre scènes hétéros et scènes lesbiennes (les premières étant plutôt violentes alors que les secondes sont tout de même plus reposantes). Le film décline en effet inlassablement le schéma suivant : Yan voit sa femme prendre du plaisir avec une autre femme (voire plus si affinités), le vit plutôt mal et part étancher sa soif en besognant (beaucoup trop) longuement de jeunes asiatiques boudeuses. Et dans tout ça bien sûr, Crystal Sun qui est pourtant charmante, est aussi et surtout tellement pudique que c’en est déplacé !
Ce qui est étonnant avec cette fantastique société de production qu’est Matrix..., c’est qu’au fur et à mesure que ses réalisateurs délaissent l’humour pour tenter de s’immiscer dans le monde du softcore quasi-hard dans le ton (cf. My Horny Girlfriend, qui avait au moins le mérite de profiter de Grace), ceux-ci deviennent aussi de plus en plus extrémistes, voire caricaturaux. Je pense par exemple à cette scène toute en finesse où le doigté de Yan (mauvais jeu de mots voulu) sur une de ces femmes numérotées débouche sur une jouissance - masculine ? Féminine ? - simulée à l’aide d’un jet d’eau d’une bonne dizaine de secondes sur une portée de plusieurs mètres. La classe.
Avec ce genre d’attitude, monsieur Cary Grant et ses autres potes producteurs auraient mieux fait de continuer à se la jouer gentillet et bucolique à la Fox Ghost : Emmanuelle in Hong Kong offre certes un lot plus ou moins satisfaisant (car trop avare de peau il faut bien l’avouer !) de va-et-vient, jeux de langues et j’en passe, mais baigne dans une vulgarité qui ne serait pas si dérangeante si elle n’était pas la plupart du temps parfaitement ridicule. Et Dieu que tout ça aurait bénéficié de quelques sourires ! Quel ennui que le plaisir il est vrai...
Du coup pour répondre à la question posée en préambule : il ne reste que peu de choses de nos amours, malheureusement. A savoir le pouvoir de nos esprits pervertis, d’imaginer ce que ce film aurait pu être si un Jess Franco teinté de Russ Meyer s’était emparé de la photo en tête d’article, et avait convaincu Grace Lam de rester parmi nous...
Comme d’habitude, c’est Universe qui s’y colle en DVD et VCD HK.



