Infernal Affairs
Si toutes les pommes du panier sont pourries, il faut en prendre directement sur l’arbre... mais que faire si les racines de l’arbre sont elles aussi pourries ?!
Dix ans, dix longues années que Yan est infiltré dans les triades. Cette mission secrète qui ne devait durer que 3 ans se prolonge, et d’année en année son supérieur, le commissaire Wong, le pousse à continuer. Mais ce jour-là, la seule autre personne qui connaissait sa véritable identité décède et plus que jamais Yan souhaite retrouver une vie normale.
Ming quant à lui est flic depuis dix ans, ses excellents résultats lui ont valu d’être nommé à la tête du Crime Intelligence Bureau. Mais Ming possède un secret que même sa petite amie ignore. En effet, bien avant d’entrer à l’académie de police, il était membre d’une triade.
Sam est un visionnaire. Sam voit loin, à long terme. Sam dirige la plus puissante triade du moment. Sam a convaincu ses jeunes recrues de s’engager dans les forces de police pour mieux le servir. Sam a trouvé en Ming son meilleur élément de prévention envers la police - et surtout envers le superintendant Wong. Depuis 4 ans, Sam a sous ses ordres Yan, en qui il voit son plus fidèle bras droit, et pour cette raison il le charge de démasquer le policier infiltré dans sa triade.
Wong a eu la même idée que Sam : envoyer un jeunot infiltrer les triades avant qu’il ne soit "corrompu". Wong est le seul à connaître l’identité de Yan. Wong accepte que l’arrestation de Sam soit la dernière mission de Yan. Mais à une seule condition : il faut qu’il trouve la taupe, infiltrée dans son service, qui renseigne le mafieux.
Un casting de rêve... Hong Kong dans toute sa splendeur.
Tony Leung et Andy Lau sont depuis longtemps des habitués de la ligne éditoriale de Sancho. Il est d’ailleurs bien rare que les rôles principaux soient supplantés par les seconds. Mais il faut dire que les performances d’Anthony Wong et surtout de l’immense Eric Tsang (qui confirme rôle après rôle son inquantifiable talent ; Hold you tight, Cop on a Mission, The Losers’ Club) éclipsent souvent celles des têtes d’affiche. Aaah quelle scène d’interrogatoire !!!
Statut d’idole Sanchesque oblige, Anthony Wong reste le maître de tous en matière de jeu d’acteur ; il recevra certainement une récompense lors de la prochaine cérémonie des HK Awards, chose qu’il devrait obtenir tous les mois en fait !!
Beaucoup de choses ont été dites, écrites, pensées, incomprises... Stop aux préjugés, faîtes-vous votre propre idée. En même temps, à la vue du film, certaines déceptions sont compréhensibles et justifiées. Prenons pour exemple les personnages de Kelly Chen et Sammi Cheng dans le film. L’humanisation des héros passe par leur présence à leurs côtés. Tout héros torturé a en effet besoin d’une présence affective : une femme dans la plupart des cas (Fulltime Killer, God of Cookery...), parfois un enfant (A True Mob Story de Wong Jing), un ami (Anna Magdalena). C’est en ce sens que leur présence est indispensable. Bon maintenant, le choix d’avoir utiliser des stars telles que Kelly, Sammy et Elva reste discutable. N’oublions pas que c’est Hong Kong et qu’en période de fin d’année il faut que les producteurs satisfassent les hommes comme les femmes. Alors il y aura toujours un semblant de polémique mais vous savez, quitte à ce qu’il y ait des femmes à l’écran - même dans des caméos - autant que cela soit des personnes que l’on aime, vous ne trouvez pas ? Toutefois je reste d’accord avec le fait que le personnage d’Elva Hsiao est inutile d’un point de vue narratif, et puis bon, il faudrait voir à ne pas trop insister sur certaines choses (1ère apparition d’Elva) : le spectateur moyen n’étant pas un débile profond.
Tant que nous y sommes, abordons le reste du casting. Tout d’abord Tony Leung qui nous prouve une fois de plus qu’il est le meilleur acteur de l’ex-colonie (bon ok c’est pas le seul !!) et qu’il fait tout sauf s’ennuyer (flagrant sur grand écran). A ce moment-là, il s’ennuie aussi dans Hero, et il est au bord du suicide dans Happy Together. Alors quand Tony Leung parle peu, il s’ennuie et quand Andy Lau mitraille à tout va dans Fulltime Killer en criant, il surjoue ; ça c’est de l’analyse poussée au moins...
Tony Leung incarne Yan, un flic undercover pris entre deux feux, entre deux vies, deux carrières toutes deux clandestines : triade et policier infiltré. Il n’a même pas de véritable existence, et tout ce qui le raccroche à une vie sociale, c’est Anthony Wong. Plus que cela, Leung est tiraillé entre son devoir de mettre sous les barreaux Sam, sa volonté de coincer la taupe infiltrée chez les flics, son désir de retrouver une existence "normale", sa volonté de savoir qui il est vraiment : un flic, un mafieux, un drogué ; c’est quasiment du Friedkin là. Leung est en pleine crise d’identité et sans nul doute arrivé au stade avancé d’une dépression. D’autant plus que Leung subit des pressions des deux côtés. D’une part, il est en alerte permanente du fait de son appartenance aux triades, et d’autre part Anthony Wong le pousse à continuer sa mission encore et encore, utilisant même le chantage. De ce fait, on peut dire qu’Anthony Wong se sert de Leung de la même façon que Sam se sert de Ming.
Le parallèle avec le cinéma de Friedkin et plus particulièrement To Live and Die in L.A. est encore possible. Dans ce dernier aucun personnage n’est tout blanc ou tout noir. Le personnage central est un homme avec ses défauts et ses qualités, un homme corrompu possèdant tout de même un détail en lui qui le rend sympathique, malgré son comportement associal et illégal. Bien entendu, chez Friedkin le personnage de William Petersen est beaucoup plus noir qu’Andy Lau. Et malgré la présence d’une femme à ses côtés (en passant les détails, il s’agit d’une prostituée lesbienne qui, de peur de terminer en prison, accepte de coucher avec lui, quand il le souhaite), Petersen reste l’un des flics les plus odieux du cinéma. Il n’a guère de positif que sa volonté d’arrêter le faux-monnayeur qu’incarne Willem Dafoe.
Tout ceci nous amène à la corruption, véritable fil conducteur du film, mais vous allez voir c’est un peu plus compliqué qu’il n’y paraît. Si on en croît le dictionnaire, le mot corruption signifie l’altération (dans les mœurs) de la substance d’une chose, et la putréfaction qui en résulte. Mais cela se dit aussi des moyens mis en œuvre pour détourner quelqu’un de son devoir, pour l’engager à faire quelque chose contre l’honneur, contre sa conscience. Tout autour des quatre protagonistes sombre dans la corruption, et chacun représente lui-même une forme de corruption différente. Andy Lau incarne la corruption de la jeunesse. Eric Tsang incarne la corruption du sang. Tony Leung, celle de l’esprit. Et Anthony Wong celle du devoir.
Si il est des terres où les corps se conservent longtemps sans corruption, je veux les connaître.
Le devoir justement, où se trouve-t-il ? Quelle place a-t-il ? Et l’honneur dans tout cela peut-il survivre à tant de mal ? A en croire le film, visiblement non. Toute corruption ne peut engendrer qu’annihilation. Même Tony Leung sait pertinemment que rien ne pourra le racheter à ses yeux. Car si l’honneur désigne l’estime qu’on obtient des autres, il signifie aussi l’estime qu’on peut avoir de soi-même. Et c’est cette estime que Tony Leung a perdue en chemin.
S’il y en a un qui n’a pas perdu en chemin son talent c’est bien Alan Mak qui, auréolé d’un très bon petit film avec Francis Ng Chun Yu, A War Named Desire, et d’un rôle dans Horror Hotline...Big Head Monster, frappe très fort. L’entente avec Andrew Lau est quasi parfaite, surtout qu’aucun des deux n’empiète sur l’espace de création de l’autre. Quoique, au vu de certains effets de mise en scène vus et revus cent fois et de la redondance narrative, on peut se demander si le cut final n’a pas appartenu au coréalisateur-producteur-directeur de la photographie Andrew Lau...
Tout ceci nous laisse envisager la suite ou plutôt la pré-suite qui nous parlera plus en détail de la relation Anthony Wong/Eric Tsang et de la jeunesse de Ming et Yan. Pour plus de renseignements vous pouvez vous référer à l’interview de Frederick Tsui (Responsable de la distribution chez Media Asia), qui nous a confié quelques anecdotes sur Infernal Affairs et sa suite, alors voyez le film avant !!
Bref je ne saurais que trop vous conseiller de voir Infernal Affairs au plus vite, ne serait-ce que pour la beauté des plans quand l’un des quatre rôles principaux est à l’écran. Faites vous une "bonne" opinion, s’il vous plaît.
Il existe une version ultime comprenant deux DVDs, une bande dessinée, six cartes postales - le tout dans un très beau coffret argenté.
1er DVD :
le film en 5.1 cantonais, 5.1 mandarin et en DTS cantonais,
une fin alternative,
un commentaire audio de l’équipe et des acteurs.
2ème DVD :
le synopsis,
un Confidential File qui nous montre toute l’équipe du film en train de prier et de découper un porc laqué, et qui correspond plus à une featurette, voir un petit making-of. Enfin bon y’a Andy Lau qui montre à certaines personnes de quelle façon il faut pointer une arme... et puis y’a quand même la séance d’enregistrement de la chanson finale, et des images de la première... et la bande annonce en anglais et au format 2.60 du film avec un accent à couper au couteau (Tony Leong Chiou Veille), du genre le mec qui a fait celle d’Ocean Shores ("Ocean Shores presents... kahochikacheu"),
le clip video du film dans ses deux versions, cantonaise et mandarine.
teaser, trailer, TV spot et trailers de Cat & Mouse (film à voir absolument), Naked Weapon, et He loves me, He loves me not (titre anglais du film français A la folie pas du tout avec Audrey Tautou et Samuel Le Bihan).
tout ce qui a été conçu au niveau affiches, posters, calendriers, photos.
un bout du véritable making-of (16 minutes) et des montages plus court de celui-ci. Interviews des acteurs et de l’équipe.





